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(toutes les images de ce post viennent de Wikipedia)

Les holoturies, plus connues sous le nom de concombres de mer, sont des animaux marins de la famille des échinodermes (où l’on trouve également les étoiles de mer et les oursins) et que l’on retrouve dans toutes les mers du monde, de la surface aux abysses. Comme leur sobriquet l’indique clairement, les holoturies ont un corps mou et allongé, qui peut néanmoins arborer des formes et des couleurs variée, tout en restant invariablement assez moches, il faut bien le reconnaître. Mais ça n’empêche pas plusieurs espèces d’être des mets appréciés, notamment dans la cuisine asiatique (soit dit en passant, le premier être humain à s’être demandé quel goût cette bestiole pouvait bien avoir, et à l’avoir cuisinée, a droit à toute mon admiration).

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Malgré leur apparence inoffensive, les concombres de mer présentent tout un arsenal de techniques de défense plus ou moins fantaisistes, à savoir :

  • L’émission de toxines, qui vont décourager nombre de prédateurs.
  • La bioluminescence.
  • L’éviscération, l’holoturie va expulser ses organes internes par l’anus (ce qui va couper l’appétit du prédateur ?), après quoi il lui faudra vivre au ralenti quelques semaines, le temps que de nouveaux organes soient régénérées.
  • L’émission de tubes de Cuvier : soit des petits filaments gluants qui vont immobiliser son agresseur.

Et bon appétit bien sur…

  • Le durcissement, le corps de l’holoturie peut se rétracter, ce qui va permettre à l’animal de devenir dur comme la pierre

Ce sont ces deux dernières stratégies qui nous intéressent et qui valent à l’holoturie les honneurs de ce blog. En effet, les tubes de Cuvier comme le corps du concombre de mer peuvent changer de propriétés mécaniques car ils sont constitués d’une fibre composite, le Mutable Collagenous Tissue (MCT), donc la consistance peut varier sur des intervalles de temps courts (de quelques dizaines de secondes à quelques minutes). On distingue en général trois états pour le MCT : Mou, standard, ou rigide. Le passage d’un état à l’autre peut être contrôlé par l’environnement de l’animal. Ainsi, un morceau de derme d’holoturie plongé dans de l’eau de mer standard comprenant des ions calcium (Ca2+) sera dans son état standard. L’ajout d’ions potassium (K+) entraînera un passage vers l’état rigide, et si au contraire on supprime le calcium on observe une transition vers l’état mou.

L’état du MCT peut également dépendre de sa composition. Dans celui-ci, on trouve bien sur des fibres de collagène, dont nous avons déjà parlé précédemment, mais également diverses protéines qui peuvent être exprimées de manière variable par l’animal selon qu’il est en situation de stress ou non. Celles-ci ont justement pour mission de moduler les interactions entre les fibres de collagène, et donc par conséquent la flexibilité du MCT. Parmi ces protéines modulatrices, on trouve par exemple la tensilin, qui a pour mission de faire passer le MCT de l’état mou à l’état standard, le NSF (New Stiffening Factor, soit le nouveau facteur de rigidification), qui se charge du passage à l’état rigide, ou encore la softenin, qui sert elle à ramollir le MCT (et au passage rappelez vous ce qu’on avait dit sur le nom des protéines…).

Si les holoturies fascinent tant les chercheur·se·s, c’est bien sur parce qu’une meilleure compréhension du fonctionnement du MCT ouvre des perspectives en terme de biotechnologies, pour la production de matériaux intelligents dont les propriétés mécaniques peuvent être modulées à volonté. Mais aussi parce qu’elle nous permettrait de mieux comprendre certaines pathologies humaines associées à des anomalies dans les fibrilles de collagène, comme par exemple le syndrôme d’Ehler-Danlos.

Pour en savoir plus sur les holoturies : Un post riche en belles images (et en blagues de mauvais goût) pour être incollable sur les concombres de mer.