Si l’hémoglobine et ses cousines ont la charge d’assurer le transport de l’oxygène chez la totalité des vertébrés ainsi qu’un grand nombre d’autres espèces (bactéries, champignons ou plantes), elles n’ont néanmoins pas le monopole de cette fonction dans le vivant.
Chez certains mollusques et arthropodes, c’est une autre protéine, l’hémocyanine, qui s’occupe d’acheminer l’oxygène jusqu’aux cellules. Tandis que l’hémoglobine reste confinée à l’intérieur des globules rouges, l’hémocyanine va flotter librement dans l’hémolymphe, le liquide circulatoire qui tient lieu de sang aux arthropodes (arachnides et crustacés). Mais la différence la plus marquante entre ces deux molécules vient des atomes métalliques qu’elles hébergent en leur sein. Alors que l’atome de fer des globines leur confère une couleur rouge-brune caractéristique, l’hémocyanine comporte quant à elle deux atomes de cuivre qui vont donner à la protéine quand elle porte une molécule de dioxygène une superbe couleur bleue.
On retrouve cette belle couleur notamment chez la limule, ou crabe fer à cheval, dont l’hémolymphe possède une autre propriété remarquable. Lorsque celle-ci entre en contact avec des toxines d’origine bactérienne, même présentes en quantité infime, l’hémolymphe va se gélifier, via l’action d’une série d’enzymes coagulantes, bloquant ainsi l’infection en cours. Du fait de cette propriété, l’hémolymphe de limule est notamment utilisée pour s’assurer de l’absence de toutes toxines dans le milieu médical. Les limules sont ainsi pêchées sur la côte Est des États Unis, où elles se voient prélever jusqu’à 30% de leur hémolymphe avant d’être rejetées à la mer. Néanmoins cette pratique entraîne une forte mortalité (de l’ordre 20%) chez les limules ainsi traitées, et les populations ont considérablement décliné dans les trente dernières années, menaçant ainsi cette espèce préhistorique.
