Contrairement à ce que leur nom pourrait laisser imaginer, les kinases ne sont pas des protéines titulaires d’un brevet de natation. Il s’agit en effet d’une vaste famille d’enzymes qui ont pour point commun la capacité catalyser le transfert d’un groupe phosphate (PO43-) depuis une molécule d’ATP vers une autre molécule, que ce soit un petit ligand, un résidu d’une autre protéine (on parle alors de phosphorylation), un lipide ou encore une sucre. Il existe donc autant de kinases que de sites de fixation potentiel du phosphate et ces enzymes jouent un rôle clé dans de nombreux processus de signalisation au sein de la cellule.

Les kinases peuvent prendre des tailles et des formes variées, et elles existent souvent sous deux états, actif et inactif :

Sur cette photo de groupe des kinases en vacances, on retrouve par exemple la Golgi casein Kinase (à gauche, pdb 5yh3), qui est chargée de phosphoryler la caséine. Cette enzyme comporte deux domaines avec des structures similaires, mais seul le domaine violet comporte un site catalytique, alors que le domaine magenta est une pseudokinase, qui permet d’activer le domaine catalytique. Au centre on a la pyruvate kinase (pdb 4fxf), qui joue un rôle dans la régulation de l’énergie au sein de la cellule. L’enzyme est ici sous sa forme active, tétramérique, tandis que la forme inactive est un simple dimère.

Enfin, la Src tyrosine kinase (pdb 2src) à gauche sert à transmettre les messages concernant la croissance de la cellule. Pour plus d’efficacité, les chaînes de transmission de l’information au sein de la cellule sont souvent redondantes. Ce qui signifie que le blocage d’une seule kinase ne suffit pas à empêcher le bon fonctionnement cellulaire. Par contre, une activité trop importante de cette kinase induit une croissance ininterrompue de la cellule qui finira alors en tumeur. Plus généralement, les kinases sont souvent surexprimées dans les cellules cancéreuses et représentent une cible thérapeutique importante, le blocage de leur activité permettant d’entraver la croissance des tumeurs.

S’il existe déjà des inhibiteurs de kinases efficaces, on rencontre néanmoins des problèmes de résistance aux traitements. Récemment une équipe de recherche américaine a pu montrer que certaines kinases peuvent présenter des mutations localisées au niveau des résidus gardiens. Ces résidus contrôlent l’accès des petites molécules thérapeutique jusqu’au site actif de la kinase, et dans les mutants, ces molécules ne parviennent plus à bloquer le fonctionnement de l’enzyme. De plus ces mutations ont tendance à stabilizer la forme active de la kinase, ce qui va induire un regain d’agressivité de la tumeur en réaction au traitement qui était censer la combattre. Ces premiers résultats sont donc très important pour notre compréhension de certains cancers et le développement de nouvelles stratégies pour lutter contre ceux-ci.

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